Pierre-Auguste Renoir

(1841-1919)

 

 

La peinture d’Auguste Renoir est une célébration de la vie. Tout au long de sa carrière, malgré les périodes de doute, de crise, de découragement, malgré aussi le handicap et les souffrances infligés par la maladie, il s’est attaché à rendre le bonheur de l’instant.

Auguste Renoir apprend d’abord, à l’âge de 14 ans, le métier de peintre sur porcelaine. Il en garde le goût des tons clairs et transparents[1]. Il visite régulièrement le musée du Louvre, où il admire les œuvres de Pierre Paul Rubens et des peintres français du XVIIIe, tels que Antoine Watteau, Jean-Honoré Fragonard, François Boucher. En mars 1862 il est reçu au concours d’entrée de l’École des Beaux-Arts (il est officiellement inscrit le 1er avril), en parallèle il s’inscrit dans l’atelier privé de Charles Gleyre où il se lie d’amitié avec Frédéric Bazille, Claude Monet et Alfred Sisley inscrits les derniers mois de 1863. Dès cette année Renoir peint avec eux à Chailly-en-Bière, en bordure de la forêt de Fontainebleau ; il y rencontre Narcisse Diaz, qui l’incite à éclaircir sa palette. 1863 est aussi l’année du Salon des Refusés, créé par Napoléon III, où les exclus du salon officiel peuvent montrer leur travail. Edouard Manet y envoie Le Déjeuner sur l’herbe (musée d’Orsay, Paris) refusé par le Salon officiel. Avec le Salon des Refusés émerge dans la seconde moitié du XIXe siècle une modernité artistique en opposition avec le goût officiel. Les artistes non admis au Salon vont de plus en plus se regrouper en sociétés ou associations indépendantes du système institutionnel afin d’organiser des expositions libres (sans jury ni récompenses), en marges des manifestations officielles – ainsi la « Société anonyme des peintres, sculpteurs, graveurs, etc. », réunissant les impressionnistes.

 

Les historiens de l’art distinguent habituellement cinq périodes dans l’œuvre de Renoir : les débuts marqués par Courbet et Delacroix ; les années impressionnistes (1869-1880) ou période bleue ; La manière aigre dite aussi ingresque jusqu’en 1889 ; la période nacrée ou ivoire jusqu’à environ 1899 ; les dernières années appelées période rouge ou rose.

 

Renoir quitte l’École des Beaux-Arts en 1864. A l’arrivée des beaux jours il travaille avec Claude Monet en plein air à la campagne à Chailly, puis à Marlotte où il fait la connaissance de Gustave Courbet. Ils se rendent aussi sur les bords de la Seine, Bougival, Chatou, Argenteuil. En 1867 Renoir peint Lise à l’ombrelle (Folkwang Museum, Essen) qui, avec la lumière tamisée par les feuilles des arbres, fait écho au travail de Monet à la même époque, notamment dans Le Déjeuner sur l’herbe (musée d’Orsay, Paris).  Les deux artistes peignent d’ailleurs de nouveau ensemble au bord de l’eau sur l’île de la Grenouillère durant l’été 1869. Dans le tableau éponyme de Renoir les touches colorées rendent le scintillement de l’eau et les effets de lumière (MET, New York). A la même époque, sa peinture est encore très marquée à la fois par Gustave Courbet et par Eugène Delacroix comme l’illustre l’Odalisque de 1870 (National Gallery of Art, Washington). La peinture d’Edouard Manet est cependant pour ces jeunes artistes une référence essentielle. Comme lui, ils s’appliquent à être de leur temps et à peindre ce qu’ils voient. Leurs sujets sont ceux de la vie moderne. Ils peignent leur époque telle qu’ils la voient : la capitale frémissante de vie ; le Paris du Baron Haussmann, des parisiennes vêtues à la dernière mode, des jeunes femmes dans leur quotidien, les modistes, les blanchisseuses, les loisirs, l’opéra, le théâtre, les guinguettes, le canotage, les régates, etc. Un Atelier aux Batignolles (musée d’Orsay, Paris) peint par Henri Fantin-Latour en 1870, est un hommage à Edouard Manet, assis en train de peindre, autour duquel sont groupés les jeunes artistes et écrivains ralliés à la « nouvelle peinture » (Auguste Renoir, coiffé d’un chapeau ; Zacharie Astruc, sculpteur et journaliste ; Émile Zola, porte-parole du renouveau de la peinture ; Edmond Maître, fonctionnaire à l’Hôtel de Ville ; Frédéric Bazille et Claude Monet).

 

La peinture de Renoir et de ses amis émerge dans un contexte de crise. En juillet 1870 débute la guerre franco prussienne – qui emporte d’ailleurs le peintre Frédéric Bazille. Monet et Camille Pissarro se réfugient à Londres. Renoir est mobilisé jusqu’en mars de l’année suivante, alors que commence la Commune de Paris. Par l’intermédiaire de Monet et de Pissarro, il fait la connaissance du marchand Paul Durand-Ruel qui lui achète quelques tableaux début 1872. A l’été, il peint sur les bords de la Seine à Argenteuil avec Claude Monet et Gustave Caillebotte, acteur majeur de l’impressionnisme avec sa peinture et le soutien sans faille qu’il apporte à ses amis dans l’embarras en achetant leurs œuvres.

En 1874 Renoir peint La Loge (Courtauld, Londres), Parisienne (National Museum, Cardiff), Danseuse (National Gallery of Art, Washington). « Nous voulions, en 1874, dans nos tableaux, des accords gais, de la vie sans littérature[2] ». Ces œuvres figurent avec quatre autres de sa main, dans la première exposition de la « Société anonyme des artistes peintres, sculpteurs, graveurs, etc. », présentée dans l’ancien atelier de Nadar, 35 boulevard des Capucines, du 15 avril au 15 mai 1874. Parmi les artistes les plus connus y exposent Edgar Degas (dix œuvres), Claude Monet, Berthe Morisot (neuf œuvres chacun), Camille Pissarro, Alfred Sisley (cinq œuvres chacun), Paul Cézanne (trois œuvres). Ils forment le noyau des impressionnistes. Renoir assure l’accrochage. Les œuvres font scandale. Le tableau de Monet, Impression, soleil levant, peint en 1872 (musée Marmottan, Paris) qui suscite de nombreux sarcasmes, donne son nom à la peinture de ces jeunes artistes. Renoir a un rôle actif dans l’organisation des premières expositions du groupe. En 1876, lors de la deuxième exposition, Degas présente vingt-quatre œuvres, Monet et Renoir dix-neuf, dont de ce dernier Portrait de jeune fille [mademoiselle Legrand], 1875 (Philadelphia Museum of Art), Femme au piano, 1875-1876 (Art Institute, Chicago), La Promenade, 1875-1876 (The Frick Collection, New York). Les Raboteurs de parquet de Gustave Caillebotte (musée d’Orsay, Paris) sont également dans l’exposition. En parallèle, de la manifestation des impressionnistes, Manet ouvre son atelier au public du 15 avril au 1er mai, ses envois au Salon officiel ayant été refusés. La même année, l’écrivain et critique – dans La Gazette des Beaux-Arts notamment –, Edmond Duranty, publie une brochure en faveur des jeunes artistes : La Nouvelle peinture à propos du groupe d’artistes qui expose dans les galeries Durand-Ruel.

 

Renoir est encore très impliqué dans la préparation de la troisième exposition en 1877. L’artiste se souvient en 1877, « ce fut moi qui insistais pour qu’on gardât ce nom d’Impressionnistes qui avait fait fortune. C’était dire aux passants — et personne ne s’y trompa : Vous trouverez ici le genre de peinture que vous n’aimez pas. Si vous venez, ce sera tant pis pour vous, on ne vous remboursera pas vos dix sous l’entrée[3] ! » L’exposition se déroule dans un vaste appartement au 6 rue Le Peletier non loin de la galerie Durand-Ruel. Monet, Pissarro, Caillebotte et Renoir assurent le placement des œuvres. Ce dernier présente La Balançoire et Le Bal du Moulin de la Galette de 1876 (musée d’Orsay, Paris) ; Cézanne, Baigneurs au repos, (Fondation Barnes, Merion), Caillebotte, Rue de Paris. Temps de pluie (Art Institute, Chicago), Degas, L’Absinthe (musée d’Orsay, Paris), et Monet plusieurs gares Saint-Lazare (Art Museums, Harvard ; Art Institute, Chicago). Autant de tableaux qui sont aujourd’hui parmi les chefs-d’œuvre exécutés par ces artistes.

 

Renoir peint Madame Georges Charpentier et ses enfants en 1878. Georges Charpentier est l’éditeur à l’époque très en vue d’Émile Zola, de Guy de Maupassant, d’Alfonse Daudet. Il crée en avril 1879 la revue La Vie moderne, et la galerie éponyme, qui apportent un soutien conséquent aux impressionnistes. Le frère de Renoir Edmond en est rédacteur en chef en 1884 et 1885. Son épouse, Marguerite Charpentier, tient salon. Elle reçoit les célébrités du monde politique, littéraire et artistique. Cette œuvre de Renoir ainsi que le Portrait de Mlle Jeanne Samary, sociétaire de la Comédie française depuis fin 1878, sont acceptés au Salon de 1879. La renommée de ces deux personnalités dans le monde culturel n’y est sans doute pas étrangère. Ayant opté pour le Salon, Renoir ainsi que Sisley et Cézanne ne participent pas non plus à la quatrième exposition impressionniste, dite des artistes indépendants, du 10 avril au 11 mai 1879. L’année suivante, Renoir présente au Salon Pêcheuses de moules à Berneval (côte normande) de 1879 (Fondation Barnes, Merion), Jeune fille endormie, 1880 (The Clark Museum, Williamstown) et deux pastels. Aucune de ses œuvres ne figure donc dans l’exposition impressionniste de cette année-là. L’artiste rencontre Aline Charigot, sa future femme. Leur premier fils Pierre nait en 1885, ils se marient en 1890 et auront deux autres fils Jean et Claude. Madame Renoir est son modèle privilégié pour de nombreux tableaux notamment Le Déjeuner des canotiers, 1880-1881 (The Philipps Collection, Washington D.C.).

 

L’œuvre de Renoir est profondément ancrée dans le monde réel. « Tout œuvre émanant de l’imagination humaine et qui n’a pas pris son système vital dans la nature même, n’est que néant[4] » écrit-il. La nature seule à ses yeux, « possède l’essence même de l’art qui est la variété en tout. Elle est l’essence de la vie. Elle seule peut nous donner la variété de composition, de dessin et de couleur nécessaires pour faire de l’art[5] ». Il a peint de nombreux paysages, des fleurs, des fruits. Mais c’est sans doute la figure féminine qui l’a le plus inspiré. Elle est au cœur de son œuvre. Madame Renoir bien sûr mais aussi la bonne Gabrielle, les femmes de son entourage amical et professionnel. « Je me bats avec mes figures jusqu’à ce qu’elles ne fassent plus qu’un avec le paysage qui leur sert de fond et je veux qu’on sente qu’elles ne sont pas plates ni mes arbres non plus[6] ». Ses enfants et ceux de ses proches ont aussi été un sujet privilégié.

 

En 1881, ayant davantage de moyens grâce à la vente de sa peinture, l’artiste voyage en Algérie. En Algérie, confie-t-il, « la magie du soleil transmue les palmiers en or, l’eau roule des diamants et les hommes ressemblent à des Rois-Mages[7] ». A la fin de l’année, il se rend en Italie – Venise, puis Florence, Rome, Naples, Capri. Début janvier 1882, il gagne Palerme pour voir Wagner. Renoir est le seul peintre pour lequel le compositeur a bien voulu poser, Portrait de Wagner (musée d’Orsay, Paris). A son retour, il séjourne en Provence. Il retrouve Cézanne, peint à l’Estaque. Renoir effectue un nouveau séjour en Algérie en mars. Le 1er mars ouvre la septième Exposition des artistes indépendants en partie composée d’œuvres de la galerie Durand-Ruel. Y sont présentés de Renoir Le Déjeuner des canotiers, deux vues de Venise dont Grand Canal, Venise, 1881 (Museum of Fine Arts, Boston), La Lecture, 1880 (Städel Museum, Francfort-sur-le Main).

Edouard Manet meurt en 1883. Une rétrospective lui est consacrée l’année suivante révélant avec éclat le rôle précurseur de sa peinture pour l’impressionnisme. En 1883 également, Durand-Ruel offre à Renoir une grande exposition personnelle. L’année 1883 constitue un tournant dans l’œuvre de Renoir. « Vers 1883, il s’était fait comme une cassure dans mon œuvre. J’étais allé jusqu’au bout de l’impressionnisme et j’arrivais à cette constatation que je ne savais ni peindre ni dessiner. En un mot j’étais dans une impasse » déclare Renoir à Ambroise Vollard[8]. Cette époque de crise et de remise en question conduit Renoir à un changement d’esthétique. Il abandonne la touche impressionniste et revient à la ligne. Les contours des formes gagnent en précision et en franchise. C’est la période dite ingresque de l’artiste, illustrée par Les Grandes baigneuses, 1884-1887 (Museum of Art, Philadelphie) auxquelles il travaille durant trois années avançant par tâtonnements et recommencements, tentant de réconcilier la tradition de la peinture française des XVIIe et XVIIIe siècles, d’un Boucher par exemple, avec la peinture moderne. Les Grandes baigneuses rencontrent l’hostilité de la critique. De 1887 date aussi le Portrait de Julie Manet (musée d’Orsay, Paris). L’accueil défavorable réservé aux Grandes baigneuses, qui lui ont demandé tant d’efforts, contribue à décourager Renoir de continuer dans cette veine. Progressivement, vers 1890, il modifie sa manière vers une facture plus souple, des contours moins nets. Sa peinture se pare d’une atmosphère plus enveloppée, moins sèche. C’est la période dite nacrée de Renoir. En 1888, il participe à l’exposition internationale des impressionnistes organisée par Durand-Ruel à New York.

Le 21 février 1894 le peintre Gustave Caillebotte, ami et protecteur des impressionnistes meurt subitement d’une congestion cérébrale, alors qu’il était en train de peindre. Il lègue à l’État deux peintures de Jean-François Millet et soixante-cinq tableaux impressionnistes. Renoir en est l’exécuteur testamentaire. Quarante tableaux, dont six Renoir, sont acceptés par l’État en 1896. Ils sont exposés au musée du Luxembourg l’année suivante.

En 1897 également, l’œuvre de Renoir amorce sa dernière période, dite rouge ou rose. Il travaille dans un style plus direct, sans retouches, dans des tonalités dominées par le rouge, l’oranger. Ses sujets favoris sont des figures aux formes généreuses. Cette même année, il achète une maison à Essoyes, dans l’Aube, village natal de Madame Renoir, où il passe les mois d’été.

 

Une rétrospective de son œuvre est présentée à la IXe Biennale de Venise de 1901 (trente-sept œuvres). A l’orée du siècle, souffrant de rhumatismes articulaires aigus, l’artiste s’installe progressivement dans le Midi. En 1903, il loue à Cagnes la Maison de la Poste.

Le deuxième Salon d’Automne (1904) consacre une rétrospective à Paul Cézanne et une à Auguste Renoir (trente-trois peintures et deux dessins), toutes deux marquent les artistes de la nouvelle génération. Sa maladie, qui évolue assez rapidement, est de plus en plus handicapante. Renoir continue de peindre malgré tout.

Le 28 juin 1907 l’artiste achète l’oliveraie des Collettes à Cagnes-sur-Mer, où il fait construire une maison conçue par l’architecte Febvre. La famille Renoir y emménage en novembre 1908.

L’artiste expose cinq tableaux à l’Armory Show à New York en 1913 où font scandale quelques œuvres des artistes de la génération suivante, Nu descendant un escalier (1912) de Marcel Duchamp par exemple (Museum of Art, Philadelphie). La même année, à l’initiative d’Ambroise Vollard, Renoir se tourne vers la sculpture. Pour l’aider dans cette tâche, Vollard lui présente Richard Guino recommandé par Aristide Maillol, dont il était l’assistant-collaborateur le plus talentueux. Une réelle communion s’établit entre les deux artistes, travaillant aussi bien à Essoyes qu’à Cagnes-sur-Mer, aux Collettes, où Renoir fait installer un four en 1917. Artiste aux multiples talents, Guino sensibilise également les fils du peintre, Pierre, Jean et Claude, à la pratique de la céramique.

 

Mobilisés à la déclaration de guerre au mois d’août 1914, les fils du peintre, Pierre et Jean sont blessés au combat. Fin juin 1915, Madame Renoir est emportée par un arrêt cardiaque. Andrée Heuschling, dite Dédée, future épouse de Jean (1920), est le dernier modèle de Renoir – Blonde à la rose 1915-1917 (musée de l’Orangerie, Paris). Avec l’aide de Richard Guino, l’artiste entreprend de grandes figures en ronde-bosse telles que : Grande Vénus Victrix, Maternité, suivies de nouvelles sculptures à partir de l’année suivante. La collaboration entre les deux hommes prend fin les premiers jours de 1918. Le 13 janvier 1918, Henri Matisse rend visite à Renoir pour la deuxième fois en moins de quinze jours. Il écrit à sa femme avoir « vu des tableaux épatants[9] ». Chef de fil de l’art d’avant-garde au début du siècle, Matisse amorce à l’époque un tournant esthétique avec les odalisques. Il retourne à plusieurs reprises aux Collettes jusqu’en avril 1919.

 

Renoir s’éteint des suites d’une congestion pulmonaire le 3 décembre 1919. Il est enterré à Essoyes. Le Salon d’Automne de l’année suivante lui rend hommage avec trente tableaux de sa dernière manière. En 1923, les fils du peintre offrent au musée du Louvre Les Baigneuses, 1918-1919 (musée d’Orsay, Paris). « Renoir les considérait comme un aboutissement. Il pensait y avoir résumé les recherches de toute sa vie et préparé un bon tremplin pour les recherches à venir[10] » (J. Renoir, Pierre-Auguste Renoir, mon père, Paris, Hachette, 1962, folio 1999, cité dans Écrits, p. 244, n.198).

En 1960, la municipalité de Cagnes-sur-Mer achète le domaine des Collettes, la maison et une partie du parc, à Claude Renoir le fils cadet de l’artiste dans l’intention d’en faire un musée. Les collections du musée s’enrichissent progressivement grâce à des dons et des acquisitions. Elles sont aussi complétées par des dépôts du musée d’Orsay.

 

 

RENOIR GRAVEUR

 

Renoir vient à la gravure assez tard dans sa carrière après la crise de 1883 lorsqu’il estime être arrivé au bout de l’impressionnisme et qu’il ressent le besoin de revenir à la ligne, à un dessin plus précis. Les sujets de ses estampes sont les mêmes que ceux de sa peinture. Ses estampes sont d’ailleurs le plus souvent réalisées d’après des motifs déjà travaillés à l’huile, au crayon, au pastel ou à l’aquarelle.

Renoir exécute vraisemblablement sa première eau-forte avant août 1888 (imprimée par Delatre) à la demande de Stéphane Mallarmé pour illustrer le poème « Le Phénomène futur » du recueil Tiroir de laque (éd. Deman). L’estampe est en définitive publiée en frontispice du recueil intitulé Pages 1891. Ses dernières eaux-fortes datent de 1908, ce sont entre autres trois portraits de son fils Claude, et le seul paysage du corpus de ses estampes. Dans l’intervalle, Renoir compose une petite vingtaine d’eaux-fortes et/ou verni mou sur les sujets les plus représentatifs de son œuvre, tels que La Danse à la campagne, les baigneuses, des nus allongés, des sujets familiaux, ainsi Mère et enfant (son fils Jean) – cette dernière parait dans le premier album édité par Ambroise Vollard, Les Peintres graveurs, 1896 –, sans parler bien sûr du Chapeau épinglé gravé en 1894 et repris en lithographie trois ans plus tard ainsi qu’en 1898. Julie Manet (la fille de Berthe Morisot et d’Eugène Manet, le frère du peintre) épingle le chapeau de sa cousine Paule Gobillard. Il en existe un tirage polychrome (onze couleurs) et des tirages monochromes de plusieurs teintes (en noir, en sanguine, en vert bistré, en bistre, en orange), tous à peu près de même format assez grand « mural » (60 x 50 cm). D’autres lithographies de Renoir présentent des dimensions importantes L’Enfant à la balle (60 x 51 cm) imprimée en 1900, et Maternité (54 x 48 cm) en 1912.

Hormis quelques exceptions, les lithographies de Renoir sont des éditions de Vollard imprimées par Auguste Clot. L’Enfant au biscuit, 1898, ainsi qu’une baigneuse de 1896 devaient figurer dans le troisième Album d’estampes originales de Vollard prévu pour 1898, resté inédit. Citons enfin les portraits de Richard Wagner vers 1900 ; de Paul Cézanne en 1902 ; d’Auguste Rodin vers 1910-14, d’Amboise Vollard et de Louis Valtat contenus dans la suite Douze lithographies originales de Pierre-Auguste Renoir, éditée par Vollard en 1919.

 

 

 

 

[1] Albert André, Renoir, Paris, Georges Crès, 1919, repris dans Augustin de Butler (éd.), Renoir. Écrits, entretiens, lettres sur l’art, Paris, Les Éditions de l’Amateur, 2002, p. 26.

[2] Propos d’Auguste Renoir rapportés par Georges Besson, Renoir, Paris, Georges Crès, 1929, p. 4.

[3] Propos d’Auguste Renoir rapportés par Ambroise Vollard, Renoir, Paris, Georges Crès, 1920, p. 66.

[4] Auguste Renoir, « Grammaire 1883-1884 », repris dans Butler 2002, p. 57

[5] Ibid.

[6] Propos d’Auguste Renoir rapportés par Albert André, Renoir, Paris, Georges Crès, 1919 ; repris dans Butler 2002, p. 27.

[7] Georges Rivière, Renoir et ses amis, Paris, H. Floury, 1921, p. 190.

[8] Vollard 1920, p. 135.

[9] Archives Henri Matisse, Issy-les-Moulineaux.

[10] Jean Renoir, Pierre-Auguste Renoir, mon père, Paris, Hachette, 1962, rééd. Gallimard collection folio, 1999, cité dans Butler 2002, p. 244, n.198.

 

 

Abonnez-vous à nos actualités

Pour recevoir les invitations à nos vernissages