Jean Leyris (1939-)

 

Jean Leyris naît en Angleterre le 24 juin 1939 d’un père français, Pierre Leyris, éminent traducteur de littérature anglo-saxonne et américaine, et d’une mère anglaise, Elizabeth, appelée Betty, aux multiples talents (dessinatrice, musicienne, danseuse). Juste avant que la guerre n’éclate, la famille rentre en France. Les années du conflit se partagent entre Paris et la Savoie. Vers l’âge de six ans, Jean est envoyé en Angleterre. Sa marraine, une cousine de sa mère, prend en charge son éducation. Il passe toute sa jeunesse de l’autre côté de La Manche, non sans éprouver un sentiment de nostalgie à l’égard de la vie avec ses parents, baignée dans un milieu intellectuel littéraire et artistique stimulant autant à Paris qu’à la campagne où, durant de nombreuses années, sont accueillis les amis écrivains, poètes, peintres, parmi lesquels Pierre Klossowski et son frère Balthus. Lorsqu’il revient à Paris en 1964, Jean Leyris travaille dans des sociétés de production avant de créer à Londres avec des partenaires anglais sa propre maison de production dédiée au cinéma et au spectacle vivant (théâtre, comédie musicale).

L’année 1976 marque un tournant décisif dans la carrière de Jean Leyris. A 37 ans, il rompt avec son métier de producteur dans lequel il ne s’épanouit pas. Il s’installe en Provence conquis par la beauté de ce pays. Proche de la nature, il se consacre à l’apprentissage du dessin et de la peinture. Dans sa pratique, la peinture de Matisse l’interpelle profondément. Comment rendre le sentiment de l’espace avec des couleurs en aplat distribuées sur le plan de la toile. De cette période date la composition de paravents qui lui permet de sortir de l’espace « étriqué » de la peinture de chevalet. Ceux-ci rencontrent un vif succès. Au bout d’une dizaine d’années, il se détourne de la peinture au profit de la sculpture. Sa sculpture questionne ses propres moyens de rendre le réel sensible. Comment traduire en sculpture l’espace, la profondeur, la transparence, la matière, l’épaisseur des choses, le vide, l’air, etc. D’autres artistes se sont naturellement aventurés sur ce chemin avant lui, Alberto Giacometti notamment avec lequel il entretient une relation de proximité évidente.

 

 

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Jean Leyris, Chêne, fusain sur papier, 2010

 

Jean Leyris crée des sculptures en ronde bosse, modelées dans la terre, principalement des figures, qui se révèlent dans l’espace. Sa sculpture se déploie aussi selon une autre typologie, délaissée au XXe et au XXIe siècles, celle du bas-relief et du haut-relief, qui répond à son besoin de « mettre le dessin en relief ». L’artiste y développe des sujets traditionnellement réservés au dessin et à la peinture – en majorité des paysages et des natures mortes. Ses paysages composent des visions frontales dans lesquelles la sensation de profondeur est traduite par des éléments de reliefs et par l’étagement des plans – le sol, les arbres, le ciel. Les arbres sont aussi un motif omniprésent dans l’iconographie de Jean Leyris aussi bien en dessin (Le Chêne, Le Tilleul à contrejour) qu’en sculpture (Trois petits chênes sur un talus, Arbustes dans la garrigue). Dans ses natures mortes et ses intérieurs, l’association de la frontalité et de la profondeur crée une forme de tension expressive essentielle. Le plateau de la table où sont disposés les objets – une coupe de fruits, un livre, un vase de fleurs, etc. – évoque à la fois la planéité, par son redressement à la verticale, et la profondeur par son relief et ses bords latéraux en diagonale qui creusent l’espace (Les Artichauts), comme le font aussi les lignes du sol en parquet (Livre ouvert à l’oignon). Cézanne et Matisse ne sont pas loin.

 Jean Leyris expose régulièrement depuis 1979, date de sa première exposition personnelle. Aujourd’hui, son désir de travail est intact. Il envisage de revenir à la figure humaine sans cependant délaisser la nature qui reste pour lui une inspiration majeure.

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Jean Leyris, Buste, Plâtre, 2019.